Éblouissement

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Message par Dari Lun 24 Aoû 2015 - 0:27

Éblouissement

Je vis dans la nuit de métal.

Les stimulis électriques compensent la bassesse du ciel, le déséquilibre émotionnel du moment où le jour s'inverse avec : pour centre : plus midi mais minuit.

Tous les songes fonctionnent en majeur. Les hallucinations transforment la peau métamorphe du réel.

Je t'aime tant que je ne vois plus passer le temps. Les fumées chimiques me révèlent des trésors - artificiels ? - d'amour brut. Je ne taille rien. Les diamants poussent au bout des lumières que transmettent nos regards.

La fibre, entêtante, de la scène, au-milieu des tragédies fauves - cette candeur qui pétille dans tes yeux, désarmante. Puis des conquêtes des autres, du piaffement des chevaux, des bannières et des étendards, des vanités et des ivresses, nous décidâmes ensemble de fuir. Je scanse en zig-zag, par saccades - je t'emmène par la main. Et nous nous dégageons des guerres.

Comment décrire une illumination ? Mes jours mauves et oranges, ces nuits bleues de silence dévolues au murmure sans pareil des étoiles - tout cela, pour une image. Des estafilades sur le cœur - des rimes vertes, des copeaux d'acier.

Je me réveille enfin. Tous dansent sur des rythmes primitifs dionysiens. Tu hésites sur le seuil de cette métempsycose. Le passage des heures est si compulsif, que des tranches entières s'évaporent, tandis que d'autres, soulignées par le réalisme des horloges, paraissent démesurées.

Offrande à Déméter. Le noyau magmatique de ces quelques flammèches. Singe parmi d'autres singes, immoler la coutume, dévirer, s'écartir.

Au Roi Lézard, une révérence : sentant sur tes mains la peau froide de cet immense reptile qui danse dans les noirceurs seules du cosmos, humain.

Chaotique bouillonnement, défini par architectures harmoniques anarchiques qui fleurissent sur les sols. Irrigation mentale.

Des histoires qui viennent de ces villes. Mille existences qui sourdent du rhizome initial. Brouillard givrant sur macadam, solitude dans la multitude, fleuve de flux, reflux et marées.

Multitude, encore, celle des corps en sueur qui dansent sous l'halogène. Toute cette chair m'indiffère, quels que soient ses attraits, ton corps seul par la grâce innée, sur la mesure éveille quelques oiseaux.

Nous finirons à l'aube, étonnés d'être en vie. Buvant de la tisane au-dessus des boulevards, avant l'heure rarissime des promeneurs de l'aurore.

La machine défile par elle-même, développant par typographies ses oniriques programmations.

Un lynx passe, une seconde, d'un couvert à un autre.

Des manèges de l'ingénierie sociale, les plus beaux sortilèges. Danses pour émerveillement. Et la pure extase d'exister qui vibre du cœur au plexus, en désensablant les poumons.

Parfois, des fragments refroidis de l'ancien monde tombent des nuages. Leur répression innée des couleurs, des parfums, n'est que pour une seconde. Le rêve reprend son cours, sifflement sur la steppe.

Sur l'autre berge, par milliers, des convertis en blanc chantonnent  l'amour divin, alors que s'approchent les chasseurs alligators. Je ne sais pas prier autrement que par dévotion.

Pourtant dans cette pirogue, sous l'imminence sauvage d'un dix-neuvième déluge, nous avons de l'eau fraîche.

Toutes les époques - leurs colombages, leurs arcs en ogive, leurs buildings - filent en accéléré sur des rives que nous ne connaîtrons jamais. Je n'en comprends que des bribes.

De l'heure actuelle, des spasmes trahissent le déroulement dans le vortex-illusion du songe de cette nuit d'été, tandis que - sons divins, ou ruse de charlatan, peu importe pour moi - les musiques nous arborent en feuillage qui bourgeonne.

Des branches si près du ciel qu'elles touchent le cœur des anges.

Loin des anciens Enfers (que l'on pressent intacts).

Je ne vois pas passer le temps tant je t'adore. Toute autre considération (esthétique ou éthique) m'est aussi lointaine que l'est le non-agir des cadences d'occident.

Et, sans doute, ces myriades tiendront lieu d'épitaphes, plutôt que les discours acérés des rhéteurs.

Roc de cette certitude, longtemps après les aigles, fauves, serpents, bêtes de proie, enfin, les licornes des montagnes.

Tout mon jugement du monde vacille sur cette limite.

Flou, votre monde, floues vos ambitions, flous vos placements, floues vos stratégies ! Et les foules flouées hurlant en sourdine sous le parquet de vos valses vers l'absurde.

Fou ce pamphlet pour des prunes, te faire goûter cette mirabelle.

Folle cette idée qu'aimer éveille, et que l'or des yeux sanctifie l'unique expérience spirituelle qu'une existence humaine puisse vivre.

Nous entrons dans la nuit, avec ferveur cette fois. Cette réserve, cette douceur, qui nous rassemblent présentement sont tout ce que j'ai pu souhaiter. Cette tempérance est le tempo de mes plus fortes intensités, sensations les plus merveilleuses - cette pénombre le jardin de nos gais et chastes échanges. Dans les échos tremblés d'un vide qui m'est enfin devenu non-exhaustif.

Je te protégerai des méduses. Je ferai de ton rire un hymne, flamboyant sur tout les chemins. Je ferai de ton cœur une étoile, scintillant sur tous les abîmes.

Je ferai fleurir à tes lèvres un vibrato sur la mesure. Je ferai de tes yeux des phares, dans l'océan de nuit du monde.

J'entends les battements du passé qui font couler de tes paupières parfois la fleur légère d'un givre. Revenir à l'ancienne loi apparaît impossible. J'avance dans des tunnels de glace, où les lueurs du jour font signe. J'avance, j'avance, j'avance.

Peinture absente, figurative seulement de fugaces chatoiements. Rien d'autre que des reflets déformés et hilares ne sortiront de cette émotion centrifuge.
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Message par Cochonfucius Lun 24 Aoû 2015 - 8:40

Nuit de métal, et de poésie !
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