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Message par Thierry Sam 7 Aoû 2010 - 20:37

Je suis en vadrouille depuis le début de l'été.
Le massif des Bauges, le Vercors, le Dévoluy et là on rentre juste d'un raid en VTT dans l'Aubrac. Tente, duvets, bouffe, fringues, 300 kms sur les hauts plateaux, des paysages magnifiques...

Je suis toujours aussi surpris par la puissance méditative de l'effort long...De nouvelles expériences de "décrochement"...Il faut dire que rouler sur des pistes et des chemins pendant six heures avec vingt kilos de chargement, ça aide :)Si on ajoute le silence, les paysages, l'horizon, le ciel, l'absence parfois totale de toutes traces humaines, on ne peut guère y échapper.
Alors je sais bien qu'on peut mettre ça sur le compte des endorphines mais en fait ça m'indiffère. Je ne cherche plus d'explications, je n'ai besoin d'aucun éclaircissement. Ca ne me servirait à rien.
Je saisis au vol ce qui m'est donné.



Dernière édition par Thierry le Sam 7 Aoû 2010 - 20:42, édité 1 fois
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Message par Thierry Sam 7 Aoû 2010 - 20:40

[url=Vacances  P1030015]

Sur la Voie romaine qui relie Lyon à Bordeaux et qui traverse la Lozère.
De sacrés travailleurs ces Romains...
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Message par Lila Sam 7 Aoû 2010 - 21:10

Ave Thierry !

"L'effort long", dis tu. Combien de temps par exemple ?

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Message par Thierry Sam 7 Aoû 2010 - 21:53

Lila a écrit:Ave Thierry !

"L'effort long", dis tu. Combien de temps par exemple ?

Ca n'est pas vraiment une question de temps en fait...Mais plutôt des circonstances...La Nature, toujours la Nature. L'émerveillement, la contemplation, ne pas être en soi mais dans le monde. Alors que ce soit au bout d'une heure en traversant un plateau granitique parsemé de blocs ou en montant au col du Glandon pendant deux heures, quand l'émotion survient le temps n'a pas d'importance. Ce qui compte c'est la puissance de l'osmose. Il faut croire que l'effort physique n'est qu'un élément facilitateur. Pas une fin en soi. D'ailleurs, ça n'est pas un phénomène répétitif. Il m'arrive de faire des sorties sans que rien ne se produise, aucun embrasement, juste le bonheur de l'effort, des paysages, mais pas cette fusion inexplicable, cette certitude de n'être qu'un élément identique à tout le reste, une des images multiples de la vie.
J'ai fait tout seul une sortie en montagne en juillet : col de la Croix, col de Combe Madame, pointe de Badon et Rocher Blanc, neuf heures aller retour. C'est en arrivant à la voiture, alors que je mettais la clé dans le contact que tout a jailli. Cette certitude que tout était en moi et que j'étais là-haut, dans chaque pierre, chaque brin d'herbe, chaque bruissement des feuillages. Aucune scission. Je ne suis rien d'autre qu'un assemblage de particules, différent dans leur apparence mais simlaire dans l'énergie qui la constitue.

Demain je remonte.
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Message par Thierry Sam 7 Aoû 2010 - 22:01

C'était l'été dernier.


Juillet 2009.

Je suis allé faire du vélo ce matin, un long tour dans les montagnes, un col bien raide, juste histoire d'entretenir le bonhomme...Je savais bien que j'allais "prendre cher" comme disent mes deux gars.

Je roulais sous le soleil, douze kilomètres de montée, je soufflais les gouttes qui perlaient régulièrement au bout de mon nez ou qui venaient me brûler les yeux, je ruisselais tellement que la route devait glisser derrière moi...

Et puis là, soudainement j'ai réalisé que je ne pensais à rien ! Bon, bien entendu, il a fallu que je pense pour m'en apercevoir mais j'aurais été incapable de dire depuis combien de temps il n'y avait rien eu dans ma tête qu'un grand vide apaisé...

Quel bonheur !!

Pourquoi est-ce qu'ainsi je parvenais enfin à perdre la tête ?

La solitude tout d'abord. La première explication qui me venait à l'esprit. Dans l'absence de l'autre, je ne disposais d'aucun miroir, aucun retour vers ce moi identifié. L'autre n'est que l'architecte de ce moi. Il m'apporte le rôle qui convient à l'instant. Je n'étais ni le père qui accompagne ses deux garçons, ni le cycliste qui roule dans un groupe, rien. Aucune parole, ma voix ne venait pas me rappeler ce que je suis. Aucune attention envers cet autre que je ne dois pas perturber si je souhaite maintenir le contact, la reconnaissance. Aucun besoin d'établir cette réciprocité nécessaire envers l'autre moi qui cherche inconsciemment à construire ce qu'il pense ou souhaite "être"... Aucun regard vers cet individu que je suis à travers la communication. Personne pour me renvoyer l'image de moi. Lorsque je parle à quelqu'un, je peux voir dans ses regards tournés vers moi que "je" suis là. Mais est-ce le "je" ou le "tu" auquel il s'adresse ? Etant donné qu'il profite de la même façon de mon attention, il est probable que je ne lui donne ce sentiment d'existence qu'à partir du moment où je profite également de ce qu'il m'offre... Dès lors, nous imaginons simultanément deux êtres constitués, identifiés, séparés, face à face, comme deux entités différenciées... Et ce sentiment d'être là grâce à l'autre nous comble de bonheur. Même s'il s'agit d'un jeu de rôle auquel nous nous soumettons afin de préserver l'assemblage. Nous acceptons d'être modelés par les réactions de l'autre parce que nous y prenons forme. Parce que le "tu" se dresse et du haut de son égo se ravit.



L'épuisement ensuite. Comme une déliquescence favorable, une perdition de tous les repères. Je pensais au zazen de Jacques Brosse.

Cette identification proposée par l'autre est une superposition à la réalité. L'impression adorée qu'il y a une personne dans le monde, une croyance à laquelle je m'attache parce qu'elle me renforce. Mais là, il n'y a personne pour m'observer et me renvoyer mon image et je perds en plus la sensation éprouvée de mon corps. Et ce corps est "l'autre" entité à laquelle je suis attaché. Je ne le vois pas comme un "transporteur" mais un être à part entière, une réalité détachée de celle du monde. Hallucination.

Et là, dans le tempo de mes jambes qui appuient sur les pédales, sans que je n'ai à y penser et sans qu'aucune sensation précise ne me parvienne, je me dilue, je m'évapore, je quitte cet ectoplasme réduit à une enveloppe vidée de tout, juste animée encore (heureusement !) par les battements cardiaques et toute la machinerie physiologique qui lui obéit, sans que je n'ai besoin d'intervenir, sans que mes pensées n'aient à en prendre la charge, comme si dans la sueur qui ruisselle toutes les images afférentes à ce corps dégoulinaient, ruinées par l'abandon complet à la mécanique lancinante des jambes qui pédalent, qui pédalent...
Je ne sais pas où est le sommet, je ne m'y intéresse même pas, je fixe le goudron devant ma roue, les yeux cloués à la route, dans un vide silencieux.
L'épuisement est une humiliation bénéfique, salvatrice, je ne suis qu'un vide que personne ne regarde, que personne ne sonde, juge, observe, moule, transforme.
Je n'ai plus de tête puisque personne ne m'offre à travers ses regards la présence de cette tête, je n'ai plus de corps, il ne reste qu'un mouvement qui ne m'appartient pas, une certaine hypnose qui m'extirpe de cette carapace fracturée, un leitmotiv mécanique comme si la vie elle-même se maintenait, aucune volonté, ce n'est pas "moi" qui pédale, "ça" pédale en moi et il n'y a plus de moi mais un puits ouvert qui absorbe la lumière, l'énergie, le souffle vital, je ne cherche pas à accélérer, je ne cherche même pas à avancer, rien n'est à moi, j'appartiens à ce vide qui me remplit.



J'ai voulu quitter mes pensées à un moment... Elles revenaient à l'assaut... Alors je me suis concentré sur la remontée de la jambe gauche pendant que la droite redescend... Jacques Brosse parle de concentration pour faire zazen... Pour s'enraciner dans l'absence et découvrir la présence.

Appuie, remonte, appuie, remonte... Appu... Remon... Ap... Re...

Plus rien. Le vide.

Je n'ai rien vu des derniers kilomètres...
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Message par Lila Sam 7 Aoû 2010 - 22:19

ok, j'ai compris. okey

Le Kundalini yoga utilise cette méthode aussi. Dépasser l'épuisement et la douleur, puis l'exercice se fait sans effort...

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Message par Thierry Dim 8 Aoû 2010 - 13:32

Lila a écrit:ok, j'ai compris. okey

Le Kundalini yoga utilise cette méthode aussi. Dépasser l'épuisement et la douleur, puis l'exercice se fait sans effort...

En vélo, on appelle ça "le second souffle", cet instant où le mental lâche prise et que tout se fait sans y penser, chose étrange les sensations corporelles sont bien plus agréables, comme si les pensées disparues, l'attention à l'effort envolée, tout se faisait "naturellement", comme si ce qu'on imaginait infaisable se révélait finalement totalement accessible...C'est là que l'expression "dépasser ses limites" prend son sens sauf qu'il ne s'agit pas des limites physiques mais des résistances mentales. C'est lui qui nous bride, le corps pour sa part a des ressources insoupçonnées. Elles sont là mais ce sont nos peurs et nos réticences qui nous en privent. Peur de se faire mal, peur de ne pas s'en remettre, peur d'aller trop loin. Alors qu'on passe notre temps à aller trop loin dans la retenue...On vit à l'envers.
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Message par Lila Dim 8 Aoû 2010 - 15:17

excellent rappel, Thierry, merci. On a trop tendance à "se ménager", se décourager à l'effort, alors que le bénéfice principal se situe au-delà... Wink


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Message par Thierry Dim 8 Aoû 2010 - 16:26

Lila a écrit:excellent rappel, Thierry, merci. On a trop tendance à "se ménager", se décourager à l'effort, alors que le bénéfice principal se situe au-delà... Wink


Et c'est un "au-delà" fabuleux cette fois.:)
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Message par bernard1933 Dim 8 Aoû 2010 - 17:10

Thierry, tu me rappelles cette jeune femme, 30-35 ans, toute frêle, qui faisaient des courses à pied de plus de 100 km et qui me disait
qu' au bout de 15 ou 20 km ( je ne me souviens plus ), elle " décrochait " de toute souffrance physique et se retrouvait dans un état second , impossible à décrire, mais de bien-être absolu . Il serait intéressant de savoir ce qu' en pense la médecine . Est-ce un coup des endorphines, un " branchement " privilégié de l' hémisphère droit, après saturation ou mauvaise oxygénation du cerveau gauche ? Reviens-nous plus souvent ! Amitiés !
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Message par Lila Dim 8 Aoû 2010 - 17:13

la libération d'endorphines (ou de je ne sais plus quelle hormone: dopamine?) après un certain effort prolongé est bien connu de la médecine. En jogging, on parle de 20 minutes minimum.

Mais entre "continuer sans effort dans un état de bien être" et "atteindre un autre état de conscience", il y a une marge...
Le premier est déjà une récompense suffisante en soi, mais le second m'intrigue.

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Message par Thierry Mar 10 Aoû 2010 - 18:13

bernard1933 a écrit:Thierry, tu me rappelles cette jeune femme, 30-35 ans, toute frêle, qui faisaient des courses à pied de plus de 100 km et qui me disait
qu' au bout de 15 ou 20 km ( je ne me souviens plus ), elle " décrochait " de toute souffrance physique et se retrouvait dans un état second , impossible à décrire, mais de bien-être absolu . Il serait intéressant de savoir ce qu' en pense la médecine . Est-ce un coup des endorphines, un " branchement " privilégié de l' hémisphère droit, après saturation ou mauvaise oxygénation du cerveau gauche ? Reviens-nous plus souvent ! Amitiés !

Le point de vue de la médecine, je m'en passe facilement en fait. Personne n'a jamais compris pourquoi je marche, alors je ne vais pas attendre qu'ils me disent pourquoi je me sens "bien" quand je tape dans l'effort au long cours. Je connais un gars ici, 81 ans, qui a fait le Mont Blanc en ski de rando il y a deux ans, une caisse hallucinante alors que c'est un gringalet. Mais alors une energie à faire tourner une centrale nucléaire :)Et puis surtout, l'essentiel, je pense, une joie de vivre incommensurable...
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Message par Thierry Jeu 23 Déc 2010 - 10:31

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Voilà un aperçu des vacances. On monte et on redescend :)
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Message par Thierry Jeu 23 Déc 2010 - 10:35

Pour reprendre votre débat sur la fête de Noël.

BLOG LA HAUT
Le manque et le désir.


Tout homme veut être heureux. Y compris celui va se pendre, comme l'écrivait Pascal. S'il se pend, c'est pour échapper au malheur et donc rejoindre ce qu'il entrevoit comme un bonheur par la disparition de ce qui le détruit : le malheur en lui. Une auto destruction favorable à ses yeux. Aussi effroyable soit-elle pour le reste du monde.

Heureusement, toutes les situations de malheur ne conduisent pas à de telles extrémités. Il s'agit donc de rester lucide pour ne pas finir par se pendre à cette détresse de vivre.

Socrate annonce "que le désir est un manque" et que nous avançons dans l'existence les yeux fixés sur ce manque. Sur ces manques d'ailleurs. Car ls sont nombreux et ont une facilité à se reproduire absolument stupéfiante. Nous sommes des jardiniers performants et nous plantons des graines "de manque" sans relâche.

Sartre disait que "l'être est fondamentalement désir d'être et le désir est manque."

C'est ce qui nous condamne au "Néant" (Sartre) ou à la "Caverne" (Platon).

Nous ne sommes pas heureux parce que nous manquons précisément de ce que nous désirons. On peut craindre en plus qu'une bonne partie de ces désirs et donc de ces manques soient issus de l'imagination et non de la raison, ce qui rend leur aboutissement encore plus inaccessible.

Les Platoniciens commes les Existentialistes ont décrit cette course au désir comme un épuisement de l'individu. Dès qu'un désir est satisfait, il n'y a plus de manque, donc plus de désir. L'individu ne supporte plus ce vide du désir satisfait et cherchera frénétiquement un manque capable de nourrir un nouveau désir, une soif absolument délicieuse qu'il faudra assouvir... L'homme ne vit que dans la projection de son être dans l'assouvissement du désir, fabriqué, artificiellement parfois, par un manque. Ce que je n'ai pas me manque, je le désire. Ce que j'ai ne me manque plus et ne contient aucun désir. Il m'en faut par conséquent un autre pour que la vie soit remplie de ce désir.

La société de consommation et les dirigeants des multinationales sont des philosophes redoutables. Ils connaissent très bien les Classiques, c'est une erreur de les sous-estimer, ils maîtrisent parfaitement les rouages de l'humain et s'en servent avec une maestria éblouissante, aveuglante même, destructrice...Nous sommes des papillons de nuit attirés immanquablement par les manques fabriqués et les désirs entretenus. Qu'un lampion s'éteigne et inévitablement un autre s'allumera un peu plus loin. Pas question de laisser les consommateurs se retourner vers les lumières intérieures...Pas question de leur laisser le temps de se réjouir de l'instant présent. Il faut des désirs, encore plus de désirs, il faut des manques, toujours plus de manques. Noël sera passé qu'on pensera déjà aux oeufs de Pâques. L'hiver sera encore là qu'on trouvera déjà des maillots de bain dans les magasins. Les grandes vacances seront arrivées qu'il faudra déjà acheter le cartable de la prochaine rentrée. L'idéal est de créer même des désirs totalement absurdes afin qu'ils soient rapidement assouvis et que la frénésie du manque s'entretienne plus facilement. Créer des désirs fallacieux est plus rentable car l'individu qui parvient à l'assouvir ne risque pas de chercher à en jouir bien longtemps. La platitude de ce désir assouvi instaurera très rapidement la nécessité d'un nouveau manque et d'un nouveau désir. C'est le monde de l'insastifaction chronique. Quasiment le Monde entier marche dans cette voie.

Même en "amour", certains individus fonctionnent ainsi. C'est le manque qui les réjouit et pas la jouissance du désir assouvi. Amour kleenex qui fait pleurer celui ou celle qui est jeté.



Même les religions ont compris le système, sauf qu'elles l'ont poussé encore plus loin. Le bonheur sur Terre est impossible, ce désir ne sera jamais assouvi, ce manque sera toujours aussi redoutable jusqu'à la fin mais par contre, le Paradis offrira aux bons paroissiens l'assouvissement ultime de ce manque. Croyez en moi et je vous donnerai à votre mort le bonheur qui vous manque. La Foi peut devenir une espérance morbide.



L'espérance. Voilà le mot. Non pas l'espoir qui pousse parfois aux actes, un saisissement de l'instant plus puissant que le mirage temporel, mais l'espérance qui conduit à l'abandon, au fatalisme, à la décrépitude spirituelle. L'espérance est une fuite en avant, d'espérance en espérance, de manque en manque, de désir en désir. L'individu se complait dans l'espérance car le désir de ce qui lui manque lui donne le sentiment d'une vie remplie. L'espérance de l'argent, de l'amour, du confort, de la possession, du pouvoir...C'est une addiction redoutable qui mène certains individus à renier toutes les valeurs humaines les plus belles. Pas de partage, pas de compassion, pas d'attention, pas de tendresse, l'objectif est le moteur, le désir assouvi nourrira un désir encore plus fort, le milieu de la politique est le symbole majeur de ce fonctionnement. L'ambition devient le ferment de l'espérance. Même l'école insère les enfants dans cette perdition des âmes à travers la compétition. L'espérance d'être le "meilleur", d'obtenir le meilleur classement, la promotion désirée, le salaire mirobolant. Mais ça ne s'arrêtera jamais. Les imbrications sociales, les comparaisons, les jalousies, créeront inévitablement un manque supplémentaire. Un poste plus "élevé" même si pour cela il faut ramper. L'espérance de devenir un jour celui fait ramper les autres est une ambition incommensurable, inépuisable. Le conditionnement est si puissant que l'individu a perdu toutes retenues, toute lucidité. La réussite sociale de ces monstres de puissance, aussi destructrice soit-elle, devient la référence. Combien rêve d'être milliardaire ? Combien accepterait de prendre la place d'un Dassault, vendeur d'armes ? Une fortune dont on n'a pas idée...Un nombre de morts incalculables sous les bombes.



Bien, mais alors, que faire ?

Certains choisissent de s'étourdir pour ne plus souffrir de ce qui leur manque. Ne pas penser, ne pas réfléchir, foncer tête baissée dans la meute affolée et se réjouir immédiatement de la folie générale. Acheter, s'amuser, accumuler les divertissements, en abandonner un sitôt essayé, en trouver un autre. Espérer juste que le prochain week-end sera aussi déjanté que celui qui vient de se finir. Passer la semaine le moins douloureusement possible en multipliant les petites trouvailles dérisoires mais indispensables pour tenir six jours. Si en plus, il y a des soldes, alors là, ça va être génial...

C'est toujours de l'espérance mais seconde par seconde...Ceux-là sont faussement dans l'instant et se réjouissent d'une vie frénétique. Grand bien leur fasse.

Bon, laissons tomber, c'est mort.



Allons jouer au Loto alors et si on perd on se réjouira pendant quelques jours que le prochain tirage sera le bon.

Bon, laissons tomber, c'est mort là aussi.



Allons à l'Eglise alors et attendons la mort pour nous réjouir enfin.

Bon, là, c'est sûr, on sera vraiment mort.



Et si nous décidions de ne plus avoir d'espérance ?...Et si nous décidions que nos manques ne sont bien souvent que des inventions ? Et si nous décidions que le plaisir n'est pas à venir mais qu'il est déjà là ? Et si nous décidions que ce plaisir constant d'être là est la source réelle du bonheur ?

Bien sûr que d'espérer avoir un peu d'argent, ça aide...A moins d'aller vivre dans la forêt amazonienne ou chez les Inuits. Tout dépend aussi de ce que nous mettons derrière ce désir d'avoir un peu d'argent d'avance, une réserve permettant de ne plus être dans une survie quotidienne. Saurons-nous en avoir un usage "utile", constructif pour l'individu ? Est-ce que ça répondra à un projet destiné à entretenir une évolution de l'individu ou sa participation erratique à la société de consommation ?



Bien sûr que nous pouvons espérer trouver l'amour, le grand amour. Mais qu'en ferons-nous ? Un accompagnement fidèle et attentif de l'être aimé dans une voie personnelle ou une dépendance à l'autre, à moins que ça soit une soumission de l'autre...Les dérives sont nombreuses.



Bien sûr que nous pouvons espérer avoir un travail passionnant. Encore faut-il qu'il ne nous oblige pas à renier ce que nous sommes. Le travail, s'il n'est pas un tremplin vers un accomplissement intime de l'individu, n'est qu'un labeur. On est en droit d'espérer de l'existence autre chose qu'une vie de labeur.



Et c'est là justement qu'intervient le questionnement de la préparation de ces paramètres essentiels de l'existence. Si nous décidons de rester vivre dans le monde "occidental", nous ne pouvons échapper à la nécessité de la construction de l'existence. C'est vers l'enfant qu'il s'agit de se tourner. Le développement personnel en quelque sorte avant le développement du futur salarié...Ca n'est pas le chemin actuel de l'Education Nationale. La raison en est très simple : l'individu éveillé n'est pas un consommateur effréné, une horreur pour le PIB et les chefs d'entreprise. Pas le petit artisan du coin mais le patron des multinationales. Le gouvernement n'oeuvre pas pour les consciences mais pour le rendement, la croissance, les marges, les chiffres d'affaires. Les gouvernements sont dans l'espérance continuelle de croissance économique et les citoyens sont les outils de leur espérance. Les enfants quant à eux sont des proies si dociles.



Revenons à nos chers philosophes...Schopenhauer disait que "la vie oscille comme un pendule de droite à gauche, de la souffrance à l'ennui."

La souffrance chez lui est associée au désir de ce qui me manque. Une frustration qui mène au malheur. Quand le manque finit tout de même par être satisfait, c'est l'ennui qui surgit. Puisqu'il n'y a plus de manque, je n'ai plus de désir et la vie devient morne, triste, effroyablement ennuyeuse.

Je n'aurais pas aimé être à la place de ce Monsieur...Il me semble qu'il délaisse un aspect essentiel de la vie.

Le plaisir.

Je perçois chez lui une hantise chronique de la jouissance...Ce qu'il pensait des femmes en général me conforte d'ailleurs dans cette idée...



Voilà la vidéo de la sortie de ski d'hier.

Quelle jouissance fabuleuse, quel bonheur du corps et de l'esprit, quelle joie !! That's life !!!

C'est là, maintenant, sans aucune espérance, sans aucun objectif lointain, juste glisser dans la poudreuse, jouir de mon corps, de mon âme ré-jouie, de la lumière, du froid sur la peau, des cristaux qui scintillent, des rires de mon garçon, juste cette joie immense du saisissement de l'instant dans le creuset de mon être, tirer du plus profond tout ce dont je dispose, mes forces, mon endurance, ma résistance, mes réflexes, et nourrir mon corps du scintillement incandescent de mon esprit.

Quelque chose de très simple finalement.

Vivre.



http://vimeo.com/17476005



"THAT'S LIFE"

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Message par Thierry Sam 25 Déc 2010 - 18:37

On est vivant :)
Personne en montagne évidemment et vu la tempête de neige, ça se comprend :) Faut être givré pour aller skier là-dedans et on est givré. Bienheureux les fêlés car ils laissent passer la lumière, dit-on.
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Message par Geveil Sam 25 Déc 2010 - 18:48

Thierry a écrit:on rentre juste d'un raid en VTT dans l'Aubrac.
Tu aurais pu me faire signe, tu étais à deux pas de chez moi Neutral

Je viens de lire tes textes, et particulièrement celui du 23. Superbe, et merci, c'est vraiment pour moi un beau cadeau de Noël.
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Message par Thierry Sam 25 Déc 2010 - 19:14

Gereve a écrit:
Thierry a écrit:on rentre juste d'un raid en VTT dans l'Aubrac.
Tu aurais pu me faire signe, tu étais à deux pas de chez moi Neutral

Je viens de lire tes textes, et particulièrement celui du 23. Superbe, et merci, c'est vraiment pour moi un beau cadeau de Noël.

Mince...On est passé en trombe en fait Gerève, juste le temps de faire notre virée, magnifique ce "pays", une rudesse si belle, solitude délicieuse, des heures à rouler dans des paysages immobiles, des wagonnets de nuages sur d'autres rails et nous sur nos bécanes cahotantes. Cette voie romaine, on s'en souviendra longtemps. Et on y retournera avec les enfants.
Merci pour le texte du 23, ravi que ça te plaise. :)
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Message par Geveil Sam 25 Déc 2010 - 19:18

Alors, si vous y retournez, pensez à réserver une chambre, histoire de souffler un peu.
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Message par Thierry Sam 25 Déc 2010 - 19:27

Gereve a écrit:Alors, si vous y retournez, pensez à réserver une chambre, histoire de souffler un peu.
Promis. L'idée est de partir de Genève et d'aller jusqu'à Compostelle. On aura bien besoin de souffler :)L'intérêt de l'itinéraire en dehors de la beauté des paysages est qu'il est très bien balisé tout en offrant de nombreuses variantes.
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