Discours de Barenboim à la réception d'une distinction honorifique Israélite

Aller en bas

Discours de Barenboim à la réception d'une distinction honorifique Israélite Empty Discours de Barenboim à la réception d'une distinction honorifique Israélite

Message par Invité Sam 14 Fév 2009 - 12:53

Dans la suite de mes derniers posts, voici ce fameux discours prononcé lors de la réception du prix "Wolf", qui a fort fâché les autorités Israélites. Voilà un homme qui ose dire ce qu'il pense, même au plus mauvais endroit ! C'est ce que j'apelle avoir le courage de ses opinions, ce qui est possible quand on sait qu'elles sont JUSTES, et qu'on est prêt à se mettre en danger pour les défendre.

En français:
"C’est quatre ans après la proclamation de l’indépendance d’Israël, en 1952, que je suis venu dans ce pays, avec mes parents, d’Argentine. J’avais dix ans, à l’époque. La déclaration d’indépendance d’Israël nous permettait de croire en des idéaux qui faisaient de nous, qui étions des juifs, des citoyens israéliens.

Ce document remarquable exprimait l’engagement suivant : «L’Etat d’Israël se consacrera au développement de ce pays pour le bénéfice de tous ses habitants ; il sera fondé sur les principes de l’égalité, de la justice et de la paix, guidé par les visions des prophètes d’Israël ; il assurera une totale égalité des droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans égard à leur croyance religieuse, à leur ethnie ou à leur sexe ; il garantira à tous la liberté de religion, de conscience, de langue, d’éducation et de culture. »

Les pères fondateurs de l’Etat d’Israël, qui signèrent cette déclaration, s’engagèrent également – et nous engagèrent, nous, par la même occasion – « à rechercher la paix et de bonnes relations avec tous les Etats et peuples avoisinants. »

Je demande, aujourd’hui, avec une immense peine : « Pouvons-nous, quelques soient nos réalisations, ignorer l’immense fossé entre ce que la déclaration d’indépendance promettait et ce qui a été accompli – ce fossé entre l’idéal et les réalité d’Israël ? » « Les conditions de l’occupation et de la domination sur un autre peuple sont-elles compatibles avec la déclaration d’indépendance ? L’indépendance de l’un tient-elle debout, si elle est au dépens des droits fondamentaux de l’autre ? Le peuple juif, dont l’histoire est un catalogue de souffrances continues et de persécutions incessantes, peut-il se permettre de rester indifférent aux violations des droits d’un peuple voisin et à ses souffrances ? L’Etat d’Israël peut-il s’offrir le rêve irréaliste d’une solution idéologique à ce conflit, au lieu de rechercher activement une fin pragmatique et humaniste, fondée sur la justice sociale ? »

Je suis persuadé qu’en dépit de toutes les difficultés objectives et subjectives, l’avenir d’Israël et sa place dans la famille des nations éclairées dépendent de sa capacité à réaliser les promesses de ses pères fondateurs, telles qu’ils les formulèrent dans la déclaration d’indépendance.

Je pense depuis toujours qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit judéo-arabe, ni d'un point de vue moral, ni d'un point de vue stratégique. Dès lors que c’est une solution d’une autre nature qui doit être trouvée, je pose la question : « Qu’attendons-nous ? »

C’est la raison pour laquelle nous avons fondé, mon regretté ami Edward Said et moi-même, un atelier de travail pour de jeunes musiciens, juifs et arabes, originaires de tous les pays du Moyen-Orient.

Bien que la musique soit un art qui ne supporte aucun compromis, dans ses principes, et bien que la politique, en revanche, soit l’art des compromis, lorsque la politique transcende les limites de l’existence présente et s’élève jusqu’aux sphères supérieures du possible, elle peut ê tre rejointe, là-haut, par la musique.

La musique, c’est par excellence l’art de l’imaginaire, c’est un art libéré de toutes les limitations imposées par les mots, c’est un art qui touche aux profondeurs de l’existence humaine, c’est un art des sons, qui ne connaît aucune frontière, les traversant toutes. En cela, la musique peut transporter les sentiments et l’imagination des Israéliens et des Palestiniens vers d’autres sphères non encore imaginées. C’est pourquoi j’ai décidé de consacrer l’allocation du Prix de la Fondation Wolf à des projets d’éducation musicale en Israël et à Ramallah."

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum