Le stoicisme

[alex_x]

Je fait parti d'une fraternité anonyme lié à un problème de dépendance. Quelques membres non croyants avons créé un groupe pour athée et agnostique. Cet été j'ai beaucoup échangé avec un membre sur la philosophie des stoïciens. J'ai découvert ce qu'elle pouvait m'apporter. Je vous partage quelques notes.

“Fais chacun de tes actes comme si c'était le dernier de ta vie.” (Marc Aurèle)

Tout d'abord, ce que n'est pas le stoïcisme. Dans la culture populaire, nous rencontrons le mot stoïque souvent pour souligner une attitude. Elle consisterait à ne pas montrer ses émotions ou, pire, à les supprimer. Ce n'est pas du tout ce que prône cette philosophie. Le philosophe pour ces penseurs n'est pas celui qui ne connaît ni la jalousie, ni la peur ou la colère. Pour eux, c'est la paix intérieure qui est recherchée. Cela passe par la libération des passions.  

Une émotion est une impulsion naturelle que nous ressentons devant un objet. L'individu n'en est pas responsable. Par contre, une fois qu'il en a conscience c'est lui qui va donner ou non son attention à l'impulsion. Lorsqu'une impulsion engendre une réaction déraisonnable, le stoïcien parle de passion. C'est un dérèglement intérieur. La réaction démesuré provient d'une représentation erronée. La passion est le produit d'une erreur de jugement. Cela se produit au niveau de la raison.

Pour éviter les erreurs de jugement, nous sommes appelés à regarder ce qui se passe en nous de manière rationnelle. Nous devons considérer nos jugements d'une manière objective. La philosophie stoïque accorde une grande importance à la vie intérieure et la rationalité. Elle est toute proche de certaines écoles de méditation qui nous invite à observer les enchaînements de nos pensées et la production des impulsions (et des passions correspondantes).  

Nous ne pouvons pas éliminer les impulsions intérieures (les émotions). Par l'usage juste de notre pensée, nous pouvons éviter les erreurs de jugements et le développement de passion en nous. De manière générale, une action sous le contrôle de la raison est préférable à une actions sous le coup de la passion.

M'identifiant comme sataniste, un des principes qui me guide dans mes actions est le suivant:

Il faut s’efforcer d’agir avec compassion et empathie envers toutes les créatures conformément à la raison. (1er principe TST)

Nous retrouvons le principe de compassion chez les stoïciens:

« Ce qui meurtrit cet homme, ce n’est pas l’événement, […] mais le jugement porté sur lui », nous encourageant aussitôt à la compassion, mais une compassion raisonnée : « En paroles, certes, n’hésite pas à compatir avec lui, voire, le cas échéant, à gémir avec lui ; prends garde toutefois à ne pas gémir aussi du dedans. »

Cette citation tirée du Manuel d'Épictète nous permet de constater que le satanisme et le stoïcisme ne sont pas très éloignés. Est-ce étonnant lorsque nous savons que le satanisme se veut une approche rationnelle de la vie? Le stoïcisme nous permet d'approfondir les principes satanistes.  

Les mots "conformément à la raison" sont très importants. Ainsi, nous considérons qu'il est possible de manger de la viande ou que nous ne devons pas agir avec la même attitude envers chacune des personnes que nous rencontrons. C'est l'interprétation habituelle des satanistes du premier principe.

Les stoïciens nous permettent d'approfondir la relation entre les émotions et la raison. Nous sommes appelés à avoir de la compassion pour les autres. Cependant, nous ne devons pas voir les autres ou nous-mêmes comme des victimes des malheurs. Vivre des événements malheureux fait partie de la vie. Une attitude juste consiste à voir comment nous pouvons agir en chacune des circonstances dans la vie. Quelles sont nos possibilités d'actions ? Parfois, la bonne attitude consiste dans à lâcher prise dans ce qui nous nuit. Les stoïciens se préoccupent d'abord de soi-même. Nous ne pouvons pas juger et agir à la place des autres. Avoir de la compassion pour les autres, c'est les laisser prendre leurs décisions. Cela revient à les laisser faire. Nous pouvons également partager – lorsque cela est possible – notre sagesse avec ceux-ci. Les stoïciens accordent également de l'importance à l'éducation d'autrui.

[Bulle]

Sujet super intéressant !

Petite précision à propos de l'histoire du Stoïcisme :

Il y a eu plusieurs phases dans le stoïcisme suivant les époques.
- Les bases ont été établies au IIIe siècle av. J.-C. avec les écrits de Zénon, Cléanthe et Chrysippe.
Il y est question de logique, d'éthique et de physique et ils énoncent les principes de la vertu, de la raison et du cosmos. C'est ce qui fonde pour eux, l'ordre naturel.
- Ensuite au IIe siècle av. J.-C. avec par exemple Panaetius et Posidonius, le stoïcisme transite vers Rome et des éléments d'autres écoles philosophique dont le platonisme s'y ajoutent et élargissent le stoïcisme à l'éthique sociale et à l'engagement politique.
- Vient ensuite le Stoïcisme Impérial (Ier et IIe siècles apr. J.-C) avec Sénèque, Epictète et Marc Aurele que tu cites.
Le stoïcisme s'adapte alors aux besoins et aux réalités de l'Empire romain avec des applications pratiques dans la vie quotidienne.  

C'est un système très flexible donc oui il ne se réduit pas à une simple attitude comme on le rencontre dans la culture populaire

[la vagabonde]

Le stoïcisme est le contraire du réactionnaire.
Il n'est pas de l’indifférence mais le contrôle de ses émotions et de ses actes.

[alex_x]

Petite précision à propos de l'histoire du Stoïcisme :

Merci beaucoup pour ton commentaire. Je découvre cette philosophie et je suis étonné de sa pertinence pour aujourd'hui. Est-ce que tu as des suggestions de lecture à me faire ?

[Bulle]

Amha, ce bouquin Le Stoïcisme - Jean Baptiste Gourinat
Il a écrit aussi un bouquin sur Hiéroclès un philosophe stoïcien méconnu mais qui mériterait de l'être !

[Bulle]

Le stoïcisme est le contraire du réactionnaire.

" Es-tu un homme ou une femme ? Un homme. c’est donc un homme que tu dois embellir, non une femme. La nature a fait celle-ci imberbe et délicate ; si elle est couverte de poils, c’est un monstre, et on l’exhibe à Rome parmi les monstres. Mais c’est la même chose pour l’homme de ne pas avoir de poils : si c’est par nature qu’il n’en a pas, c’est un monstre, mais si lui-même se les arrache, s’il s’épile, qu’en ferons nous ? Où l’exhiberons-nous et quel sera notre boniment ? « Je vous montrerai un homme qui aime mieux être une femme qu’un homme. » Le hideux spectacle ! "
Épictète, Entretiens, Livre III, chapitre 1
Si ça c'est le contraire du réactionnaire...

[alex_x]

C'est drôle ta citation d'Épictète. C'est pour cela que je cherche ce qui peut être utile dans cette philosophie. Ta suggestion de lecture m'a fait prendre conscience que nous avons la fâcheuse tendance en Amérique, de tout relire à la lumière des coachs de vie et de la croissance personnelle.

À ma librairie, les livres concernant les stoïciens sont plus du genre : Devenez un gagnant avec 15 principes de la philosophie des stoïciens (de mémoire mais c'est à peu près ça).

[Bulle]

Il faut toujours penser à remettre les écrits d'un auteur dans son contexte, ici une époque, la Rome antique, où la morale était très traditionnelle.  
Le statut juridique des femmes était limité, elles étaient sous la tutelle des hommes (le père ou le mari), et pas le droit de participer à la vie politique.

Mais tu as tout à fait raison de tout considérer en particulier ce qu'un texte dit, veut dire et ce qu'on peut bien vouloir lui faire dire