Sagesse du pluvian
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mikael
Cochonfucius
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Gallicervidé
image de l'auteur
Le gallicervidé s’inquiète, ce matin ;
Le vague souvenir de ses rêves nocturnes
Fait que son petit coeur d’un peu d’angoisse est teint,
Plus qu’à son habitude, on le voit taciturne
Il ne dit rien au troll, ni même au vert lutin ;
Le satyre versant le bon vin de son urne
Ne peut le dérider de quelques traits mutins,
Il est plus assombri qu’Hadès ou que Saturne.
Il n’a pas de souci, pourtant, pour sa santé
Le sentier par la biche est toujours fréquenté,
L’oiseau bleu lui redit son bel air bucolique.
Puisqu’il ne peut goûter le vin ni la chanson,
Il traverse les champs rasés par la moisson
Afin d’en savourer la vue mélancolique.
Reine des arbres
image de l'auteur
Dans le soir aux lueurs vermeilles
(Car bientôt s'assombrit le ciel),
Nous n'entendons plus les abeilles,
Mais nous mangeons toujours leur miel.
Un arbre absorbe la lumière
Avec un évident plaisir,
De la licorne, la crinière
A paru frémir de désir.
La dryade, en cette nuit fraîche,
Goûte des astres la clarté ;
De son bois, ne fais pas de flèches :
Elle est pure, et veut le rester.
Roi-Paon
image de l'auteur
L’admirable Roi-Paon, parmi les moissons blondes,
Se pavane en été : « Je suis fort beau », dit-il,
Sans user pour cela d’un argument subtil,
Il a l’assentiment des animaux du monde.
S’il arrive pourtant que le corbeau réponde,
Il réplique aussitôt : « Ne dis rien, oiseau vil
Dont l’horrible chanson me fait perdre le fil,
Par mon verbe élégant, quelques mots te confondent. »
Le paon lance, il est vrai, une clameur étrange,
Mais chacun reconnaît qu’il est beau comme un ange ;
Les oiseaux sont jaloux de ce roi sans pareil.
Ses pères ont charmé les émirs de Tolède,
Quand au sein de leur parc ils prenaient le soleil :
S’il ne chante pas bien, son âme n’est pas laide !
Planète « Sac de Noeuds »
image de l'auteur
Planète à subtile apparence
Et qui ne se visite pas,
Où vivent dans l'indifférence
Des créatures au front bas.
Le bonheur réchauffe leurs âmes,
Leur corps est soyeux et léger,
Dans leur regard est une flamme,
On n'ose pas les déranger.
Leurs orateurs, en harmonie
Avec cet univers charmant,
Disent une suite infinie
De blagues qui sont en flamand.
Trèfle à quatre ours
image de l'auteur
C’est le trèfle à quatre ours ; on l’admire, on le loue,
Son travail au labo n’est pas sans sans intérêt ;
Bizarre et surprenant, il est beau comme il est :
C’est un de ses pareils qui inventa la roue.
Quand il parle, on en rit ; quand il travaille, il joue ;
Chaque jour un poème en son athanor naît :
Dans l’université tout l’amuse et lui plaît,
Il y trouve du sens, trouvant l’or dans la boue.
Mais il a ses défauts, je ne le cache pas,
Il est parfois pénible au moment des repas ;
Car, comme un gentilhomme, il ne sait se conduire :
Donc, le trèfle à quatre ours n’est certes pas un saint,
Mais il n’est en son âme aucun germe malsain,
À nulle créature il n’est taillé pour nuire.
Rongeur-forgeron
image de l'auteur
Son instrument n'est pas sonore ;
Ce maigre rongeur-forgeron
S'enivre, sans bruit, dès l'aurore,
Dès l'heure où sonne le clairon.
À peine si son feu s' allume
Ses doigts par le froid sont mordus,
Et son atelier dans la brume
Est d'un bricoleur éperdu.
De la Noël au jour de Pâques,
Il prend des breuvages d'enfer ;
Son frère Jean, son frère Jacques,
Bien mieux que lui forgent le fer !
Nécropole surprenante
image de l'auteur
Cimetière étonnant, la gardienne est Cassandre,
Le funèbre jardin s’étend au bord de l’eau ;
Le soir, on y allume un millier de flambeaux
Ainsi que des lampions qu’aux arbres l’on voit pendre.
Les nocturnes oiseaux disent des choses tendres
Et racontent combien le firmament est beau,
Le feu danse à minuit au-dessus des tombeaux,
Et gagne le rivage où je le vois s’étendre.
Mon flambeau c’est la rime à la douce fureur :
La rime est un tombeau pour toutes mes douleurs,
Cassandre est mon garant, prophétesse divine.
De tous les disparus que la tombe détient,
Quel est le souvenir qu’aujourd’hui je retiens ?
Mieux vaut qu’auprès de moi, vifs, je les imagine.
Le vieux de la montagne
image de l'auteur
Le vieux de la montagne est séparé du monde ;
Son cerveau fatigué ne sait plus ce qu'il sait,
Sa voix ne chante plus les chants qu'il connaissait ,
Il ne reconnaît pas son visage dans l'onde.
Combien nous l'admirions en sa gloire première !
Et nous étions jaloux de sa félicité,
De sa compagne aussi, de si grande beauté,
Et de son clair esprit, un astre de lumière...
L'inéluctable chute, et la misère, et l’âge
Ont réduit en bouillie son système nerveux,
Et des visions d'enfer hérissent ses cheveux :
Face au démon subtil, il brandit cette image.
Ambilibellule
image de l'auteur
Une ambilibellule est d’essence divine ;
Et le nectar, pour elle, est servi à ras bord ;
Nul archange des cieux n’est plus fier ni plus fort
Que cet insecte ailé, qui charme les ondines.
Elle maîtrise bien la grammaire latine,
Paraphrasant Virgile et Phèdre sans effort ;
Son antre souterrain regorge de trésors,
Quelle-même a creusé dans la rive angevine.
Elle aime à réciter, dans le jour finissant,
D’un rhapsode inconnu, les sonnets languissants,
Sans réclamer pour ça la moindre récompense.
Depuis quatre mille ans, cet animal léger
Est, au-dessus des eaux, des brises passager,
Et c’est, dans tout son corps, la nature qui pense.
Pentacéphale
image de l'auteur
Certains ont contesté, c'est vrai, son existence ;
Il conteste la leur, et voilà, c'est bien fait.
Or, lui s'épanouit dans sa magnificence,
Fier comme un receveur, beau comme un sous-préfet.
Sa sagesse est profonde et n'est pas insensée,
Il a de nobles buts et d'excellents desseins ;
Une fleur, qui ressemble à une humble pensée,
Tout au long de sa vie, le porte dans son sein.
Des chansons de jadis dansent dans sa mémoire ;
Il s'occupe toujours selon sa volonté,
Il vit modestement, ne cherchant point la gloire,
Mais seulement le goût de la félicité !
Dionysos octobral
image de l'auteur
La terrasse qu’abrite une haute verrière
Accueille des clampins, des ducs et des barons,
Des pucelles de France avec leurs chaperons,
D’élégants souteneurs, des moines en prières.
Ces derniers ont tiré de leurs lourds bréviaires
L’éloge du pinard, le plus noble fleuron
Des pays cultivés, qu’à goûter ils sont prompts,
Se servant rarement des antiques aiguières.
Bacchus du charpentier se montre le rival,
Offrant à ses amis le nectar octobral,
Faisant revivre en eux des souvenirs sublimes.
Je vois dans le jardin la vigne verdoyer,
Préférant son parfum à celui du laurier ;
Je bois un peu de vin, Dionysos boit mes rimes.
Bande dessinée antique
image de l'auteur
L’explorateur fouille à tâtons
La sépulture si bien close ;
Un dieu à tête de mouton
Sa main sur le couvercle pose.
L’archéologue, sans un bruit
(Car sa technique est raffinée),
De sa quête exhume le fruit :
C’est une bande dessinée.
Écrit en un pâle et blême or,
Le titre de l’oeuvre a l’air d’être
«Roma tibi ibit amor»,
Le récit d’un amour à naître.
Archiduc de gueules
image de l'auteur
De gueules, l’archiduc est homme du passé,
Il garde souvenir de charmantes rencontres
Et des marques d’amour qu’en ces cas l’on démontre ;
À présent qu’il est vieux, le voici délaissé,
Par son corps tourmenté, par son temps dépassé,
Restant, des jours entiers, sans remonter sa montre ;
Les temps nouveaux, c’est sûr, il n’a vraiment rien contre,
Mais les neiges d’antan recouvrent ses pensées.
D’y retourner en songe un vieil homme ne cesse :
Il revoit le corps nu des anciennes maîtresses,
Il fleurit chaque année le tombeau de son chien.
Il est devenu calme, à défaut d’être sage :
Ses chevaux fatigués le sont bien davantage.
Ne ruminant pour eux ni le mal, ni le bien.
Empereur des tigres
image de l'auteur
Vous ne me mettrez pas en geôle,
Ni dans un logis trop étroit ;
Je ne trouverais pas ça drôle,
Je briserais le mur, je crois.
Si ma personne était visée
Par des agissements pervers,
J'en avertirais l'Elysée
Au moyen d'un numéro vert.
Car je suis le seigneur des palmes,
Je suis le maréchal des loups,
Je suis l'empereur aux yeux calmes,
Et puis non ! Je ne suis pas fou.
Nef de l’Ambibouddha
image de l'auteur
Laissant derrière lui l’humanité martyre,
Le grand Ambibouddha, dont limpide est le coeur,
Lui qui apprivoisa des Tigres l’empereur,
Avec ses animaux loin du port se retire.
Contre lui, d’Aquilon, rien ne peuvent les ires,
Son esprit pacifique en est toujours vainqueur;
Zeus lui verse un nectar, savoureuse liqueur,
Lui ne bouge pas plus que sa statue de cire.
Baleine et cachalot, sirène et lamantin,
Les animaux marins veulent que son destin
Soit heureux pour longtemps, car ça leur porte chance.
C’est le noble seigneur, le maître de pitié,
L’éternel Océan l’a pris en amitié,
Lui qui nous a promis l’avenir sans souffrance.
Éléphantasme
image de l'auteur
Bien qu'il n'existe pas, c'est un sacré colosse ;
Mais il ne faut jamais le troubler quand il bosse,
Il serait agressif, et pire qu'un jumart,
Les gens l'ont surnommé, parfois, «tête de lard».
Un pluvian est souvent posé sur son épaule ;
Il aime le contact de l'oiseau qui le frôle,
Hochant, de-ci, de-là, son petit crâne rond ;
C'est quand même moins lourd que transporter un tronc.
D'autres jours, il veut bien se promener dans l'herbe,
Ou dans les blés dorés qu'il consomme par gerbes.
Les gens le voient avec des sentiments mêlés,
Regrettant leur froment, trésor échevelé.
Colonnes gréco-bouddhiques
image de l'auteur
Entre le monde et rien circule une rivière
Dont noires sont les eaux, l’hiver comme l’été,
Abritant des requins, que l’on voit sursauter.
On dit que du cosmos elle fut la première.
Elle roule sans fin, ni modeste ni fière :
Garde-toi d’admirer son étrange beauté,
Dans l’inframonde obscur tu serais transporté,
Dont tu serais captif, en dépit des prières.
Elle peut dévorer les soldats de l’Empire,
Sans les rendre jamais aux mères qui soupirent,
Pas plus que les serpents ne rendent les oiseaux.
Les druides de jadis, (parfois, je les envie),
Savaient bien conjurer cette folle ennemie,
Mais ne le peuvent plus, du fond de leur tombeau.
Lune des monstres de sable
image de l'auteur
Lune dansant jour après jour,
Aux pensées que nul ne devine ;
L’astre dont elle fait le tour
N’est pas très nouveau, j’imagine.
Des monstres de sable, un peu fous,
Disent : « Amusons-nous, que diantre !
C’est mieux que de planter des choux,
Bien que le chou plaise à nos ventres.. »
L’infante vêtue de satin
Les écoute, et les laisse dire ;
Ils sont bien tordus, c’est certain,
Mais ils protègent son empire.
Ambicrocodile
image de l'auteur
C’est l'ambicrocodile, il aurait bien envie
D'être aimé d’Aphrodite ; et ce monstre obstiné.
Ne reste point au rang qui lui fut ordonné ;
À la vouloir séduire il consacre sa vie.
Longtemps demeurera sa quête inassouvie,
À de telles amours il n'est pas destiné.
Si dans la peau d'Arès il était plutôt né,
Peut-être la déesse eût-elle été ravie.
Chaque fois qu'il en parle, un corbeau familier,
S’en va, mauvais plaisant, rejoindre l’atelier
Du lourd Héphaïstos, dont l'âme est consumée
D'un feu de jalousie qui brûle à tout moment ;
Et dans maint hôpital s'en souvient un amant
Dont le stupide espoir est parti en fumée.
Ornithocéros
image de l'auteur
Il chante avec une voix douce,
Sa compagnie est un délice ;
Il fait un grand nid tout en mousse
Et, pendant quatre jours, le lisse.
Sitôt la première lueur,
Dès l'aube d'un long jour d'été,
Cet oiseau verse sa sueur
Pour finement le colmater.
Or, touché par le crépuscule,
Il ne peut plus faire grand-chose :
D'ailleurs, ce n'est pas un Hercule,
Ce n'est qu'un diable à langue rose !
Jumarts mutants
image de l'auteur
C’est le jumart-canard, sa chair est un délice,
Un dîner de marquis, un déjeuner de roi,
Mais il est protégé par la rigueur des lois,
Pour narguer les chasseurs, il a de la malice.
C’est le jumart-renard, il boit dans un calice
Dont il fait bénir l’eau par Merlin, quelquefois,
On entend retentir son cor au fond des bois,
Les deux jumarts mutants sont de joyeux complices.
Ces nobles animaux sont sans comparaison
Avec le jumart noir qu’on voit près des maisons,
Qui fait docilement tout ce qu’on lui ordonne.
Or, si par l’un d’entre eux vous étiez assailli,
Essayez ce moyen, qui jamais n’a failli,
D’invoquer trois cents fois le Bouddha qui pardonne.
Renarde mélomane
image de l'auteur
Une renarde au clavecin
Nous imita les vents farouches
Suivis d’un ténébreux tocsin,
Toutes ses griffes sur les touches.
Or, nous l’écoutions tristement,
Perdus dans nos rêves tragiques,
Des cordes le gémissement
Semblait une chanson magique.
On se retenait de parler,
Pris par cette immense harmonie,
Le son avait l’air de couler
D’une fontaine de génie.
Fringant dragon
image de l'auteur
Il chante une chanson dans sa petite tête,
Il a trouvé, dit-on, le bonheur qu’il cherchait
Et l’on n’a jamais vu de si joyeuse bête,
Sauf s’il songe, le soir, à des gens qu’il aimait.
Cupidon ne peut rien sur son cœur en tempête
Depuis qu’il a compris que trop d’amour l’usait.
Trop paresseux, aussi, pour être un grand poète,
Il n’a pu travailler que quand ça l’amusait.
Il s’amusa ; c’était, du reste, un dragon drôle,
N’ayant jamais trop pris au sérieux son rôle,
Dramatiser, vraiment, il n’y a pas de quoi.
Ce paisible animal, qui vit de poésie,
Y rajoute parfois un peu de fantaisie,
Il pourrait devenir un exemple pour moi.
Nef du gallosaure
image de l'auteur
Je m’en vais sur l’onde ;
Mon appel changeant
Réveille ce monde,
Je n'ai pas d’argent.
J’aime les étoiles ;
Or, je n'ai pas d’or.
Un nuage voile
Le récif qui dort.
La vie est sublime,
L’amour infini ;
Mes mâts sont sans cime,
Je n’ai pas de nid.
Trisagion
image de l'auteur
Chantons, car il n’est point saison d’être affligés,
Qu’une grande ferveur partout soit ressentie,
Pour ce que l’âme alors n’étant point divertie,
Dans le juste chemin nous sommes engagés.
Démon, tu ne peux rien, tu nous vois soulagés,
Et ta lourde fureur, par la Grâce amortie,
L’espace d’un matin s’est de toi départie,
Je vois ton fier orgueil en faiblesse changé.
Profite, en ce beau jour, du repos qu’on te donne ;
Nous sommes à l’abri de tes pointes félonnes,
Ton palais de cristal en sable est transformé.
Or, tu n’oseras plus en vouloir à nos vies
Qui de fers si pesants pour jamais se délient ;
Face au large chemin, tes yeux seront fermés.
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